C’est dans une commune de plus de 50.000 habitants dans la province de Chtouka Ait Baha (région du Souss Massa), Ait Amira, que la coopérative Skills Studies a mis en place un espace de formation pour ses jeunes. Une petite équipe installée au 1er étage d’un R+2 dans un quartier très dense en activité économique, accompagne les besoins des jeunes marocain-e-s et ressortissant-e-s de pays tiers (RTP) pour répondre à leurs ambitions de trouver un emploi ou d’assurer une meilleure insertion sociale.
« Nous avons formé environ deux cents personnes dans plusieurs domaines. Nous avons développé des packs de 6 mois de formation dans différents domaines : agriculture, assistance médicale, aide-soignant, comptabilité, gestion des entreprises, digitale, formation, commerce, etc. Mais nous n’avons pris conscience des besoins de la nouvelle population de migrants qui s’installent à Ait Amira que suite aux demandes de ces derniers d’apprendre la Darija. Cela a coïncidé justement avec le deuxième appel à projets de PRIM. », explique- il. « Cela fait une année que nous avons créé cette coopérative pour répondre à un besoin des jeunes de la commune de Ait Amira. Nous avons commencé d’abord par des cours de soutien », explique Adil Ait Addi, associé à la coopérative Skills Studies qui a fait le choix depuis peu de temps de se positionner dans une dynamique d’entrepreneuriat social sur la formation des jeunes.
L’appel à projets de PRIM a été lancé en décembre 2023, un appel qui a concerné la région du Souss Massa et qui a permis de sélectionner 7 projets dans la région du Souss Massa « Nous avons rédigé notre projet et bien ficelé ce dernier grâce à l’accompagnement de PRIM. Nous ciblons à travers ce projet de former 28 personnes marocain-e-s et RTP afin de faciliter leur insertion sociale et l’accès au marché de l’emploi », explique Adil.
Un des atouts de ce projet, c’est qu’il a pris le parti de s’adresser tant aux ressortissant-e-s des pays tiers qu’aux marocain-e-s habitant-e-s de Ait Amira, ayant les mêmes besoins en matière de d’appui pour l’insertion économique. Cela dans la perspective de faciliter la cohésion sociale et l’intégration des personnes d’origine étrangère dans leur communauté d’accueil.
Le projet au départ a été pensé pour assurer une longue période de formation de 9 mois pour ces 28 personnes cibles, mais la réalité du terrain et les contraintes des individus nous ont orientés vers une autre façon de mettre en œuvre le projet. Les bénéficiaires ne pouvant s’engager sur des formations de longues durées ont été en deux groupes de 14 personnes pour des formations de 4 mois à raison de 4 séances par semaine : les lundi, mardi, mercredi et vendredi : soit deux séances de deux heures pour la Darija et deux autres heures pour l’informatique. « Nous évitons le jour de repos qui est le jour du souk, car les bénéficiaires se mobilisent peu ce jour-là. Nous avons également remarqué qu’ils sont ponctuels » ajoute Ibtissam l’assistante de projet.
Âgés entre 19 et 40 ans de la région d’Agadir et d’autres pays subsahariens à savoir la Guinée et la Côte d’Ivoire, les bénéficiaires mobilisés dans une logique paritaire rare 7 femmes et 7 hommes suivant ces cours 4 fois par semaine partageant les mêmes ambitions : un accès au marché de l’emploi et une amélioration de leur insertion sociale dans la commune de Ait Amira et la région du grand Agadir.
Témoignages
Yahya, travailleur agricole
« Salam, ana smyeti Yahya, ana khedam f la ferme, ana men Côte d’Ivoire » (bonjour, je m’appelle Yahya, je travaille dans une ferme, je viens de la Côte d’Ivoir) s’exprime fièrement Yahya, un jeune ivoirien de 19 ans qui explique avoir facilement trouvé du travail après son arrivée au Maroc et plus précisément à Ait Amira.
« J’ai choisi de faire des cours de Darija pour communiquer avec nos frères. Dans le cadre du travail à la ferme, il y a des choses qu’on nous explique et que nous ne comprenons pas. Nous avons appris beaucoup de choses dans ces cours et cela nous permettra de mieux nous intégrer dans le marché du travail », ajoute Yahya déclarant sa satisfaction du programme de la coopérative.
« J’aimerais également pouvoir faire une formation en agriculture, afin de pouvoir mieux comprendre mon travail et m’améliorer dans ce que je fais », nous confie Yahya.
Katiatou, travailleuse agricole et future maman
Katiatou est arrivée au mois de mars 2023, en vol direct à Casablanca. Elle est venue directement à Agadir pour rejoindre son mari qui est arrivé trois mois plutôt. « J’ai entendu dire qu’on pouvait facilement trouver du travail ici dans les fermes. J’ai commencé à travailler directement après deux mois. J’étais infirmière en Guinée, j’ai fait une formation de 3 ans en tant qu’infirmière et j’ai travaillé un an. Aujourd’hui je travaille dans une ferme » explique Katiatou racontant son parcours. Âgée de 22 ans, elle s’est orientée volontairement à Skills Studies pour suivre les cours de Darija pour s’adapter au pays. Elle suit également des cours d’informatique qu’elle considère importante dans la vie d’aujourd’hui. « Je trouve le cours très intéressant, j’ai appris le Darija et l’informatique et je commence à m’adapter un peu. Ces cours me sont utiles pour pouvoir faire mes courses, et m’aideront beaucoup pour l’éducation de mon enfant … » déclare-elle en regardant son ventre nous indiquent discrètement qu’elle attend un enfant. Katiatou ne manque pas d’ambition et déclare vouloir suivre également des cours de pâtisserie.
Khadija, à la recherche d’un emploi
« J’ai pris connaissance de l’existence du centre à travers Facebook et à travers ses anciens lauréats. J’ai suivi des cours de comptabilité et des cours d’informatique. Cette formation me permettra de pouvoir postuler à différents postes à Agadir notamment dans les magasins qui requièrent ces compétences en matière de comptabilité et informatique » nous explique la jeune Khadija, âgée de 23 ans ayant quitté les bancs de l’école à la 4e année collège. « J’ai beaucoup appris ici, les enseignants nous donnent du temps et expliquent bien les choses », ajoute-t-elle a avec satisfaction.
« J’aimerai aussi pouvoir suivre également une formation de vente en pharmacie, qui est demandée dans le marché de l’emploi » déclare-t-elle pour afficher ses ambitions.
Mohamed, responsable de la gestion de stock dans une ferme
Mohamed, un jeune marocain de 33 ans qui travaille depuis 5 ans dans une ferme dans la gestion de stock. Son évolution professionnelle dépend de sa capacité d’accompagner le développent informatique de cette gestion. Il s’est orienté vers Skills studies pour suivre les cours d’informatique, notamment pour le logiciel Excel pour apprendre la gestion de stock. « Nous avons appris beaucoup de choses. Aujourd’hui je me sens capable de répondre aux exigences de mon poste au sein de la ferme. Je pense que la région avait besoin de ce centre », annonce fièrement Mohamed en ajoutant qu’il souhaite avoir une formation dans le domaine agricole.
Dans un format original d’intervention dans le domaine, la coopérative Skills Studies apporte beaucoup à sa commune en étant à l’écoute des besoins de formation de la jeunesse, mais également en assurant un suivi après la formation pour aider ses lauréats à trouver des stages ou du travail. Adil nous affirme avoir assuré le suivi et l’insertion professionnelle de plus de 70% des lauréats. « Nous faisons de notre mieux en choisissant les meilleurs enseignants et en mobilisant notre carnet d’adresses, mais les demandes de formations sont de plus en plus importantes et nous souhaitons pouvoir davantage y répondre », conclut-il pour afficher à la fois ses ambitions et les défis à venir.
Des défis et ambitions qui dévoilent une intégration de fait de la communauté des RTP, affichant les mêmes besoins et bénéficiant des mêmes opportunités que les marocain-e-s de Ait Amira.
